Il est temps de refaire un bilan de l’écosystème mobile d’Apple en 2014 suite à l’annonce de sa nouvelle gamme de téléphones mobiles dévoilés le 9 septembre dernier et disponibles quelques jours plus tard. Je vous propose une analyse personnelle détaillée et nuancée de ces produits, au-delà du matraquage marketing traditionnel. J’éviterai volontairement de parler de l’Apple Watch à laquelle je réserve un futur article après sa sortie.

La gamme iPhone 2014 se décline sous la forme de deux nouveaux modèles: l’iPhone 6 et l’iPhone 6 Plus. En réalité, ils pourraient s’appeler iPhone 8 et 8 Plus puisqu’il s’agit déjà de la huitième génération d’iPhone et que les deux modèles sont d’ailleurs mûs par un SoC Apple A8. Le nouveau CPU est 25% plus rapide que celui de la génération précédente, tandis que le GPU est environ 50% plus véloce. Il s’agit d’une évolution de puissance finalement assez modeste, raison pour laquelle l’équipe marketing d’Apple préfère dire que l’iPhone 6 est jusqu’à 50x plus rapide que le premier iPhone sorti il y a 7 ans. Malgré tout, les iPhone 6 et 6 Plus étaient les téléphones les plus puissants au moment de leur sortie (surtout au niveau graphique), bien que la concurrence les ai déjà égalés quelques temps plus tard avec notamment la sortie de nouveaux téléphones Android basés sur la puce nVidia K1.

Nouvelles tailles et vieilles recettes

Ce qui distingue avant tout ces iPhone 6 et 6 Plus, c’est bien entendu leur forme et leurs tailles d’écran. Alors que l’iPhone 5S possède un écran 4 pouces, l’iPhone 6 arbore fièrement un écran de 4,7 pouces et le 6 Plus un écran de 5,5 pouces. Ils sont dotés d’une coque plus mince, tout en aluminium. Au niveau de la taille et du poids, l’iPhone 6 est comparable à de nombreux téléphones Android tels que le Nexus 5 de Google. L’iPhone 6 Plus quant à lui rentre plutôt dans la catégorie phablette comme un Samsung Galaxy Note 3. Ce genre de téléphone est plus difficile à manipuler à une main ou à mettre dans une poche.

La première réaction de nombreux utilisateurs d’iPhone fut de critiquer ces nouvelles tailles qu’ils jugeaient trop élevées, préférant rester fidèles au traditionnel écran 4 pouces de la génération précédente. Steve Jobs lui-même disait en 2010 en se moquant de la concurrence que personne n’achèterait un grand téléphone et Apple était même allé jusqu’à créer en 2012 une publicité pour l’iPhone 5 qualifiant le choix de la taille d’écran de 4 pouces de “bon sens” car parfaitement étudiée pour un usage à une main:

Force est de constater qu’aujourd’hui la tendance (bonne ou mauvaise) est aux écrans plus grands pour les appareils haut de gamme et qu’Apple a finalement cédé pour suivre le reste du marché. Ce qui est certain c’est que l’argument “Ton téléphone Android est trop grand, l’iPhone a la taille idéale” est devenu invalide.

Ces deux nouveaux écrans d’iPhone sont labellisés “Retina HD” par les équipes marketing d’Apple, ce qui laisse sous-entendre que la densité de pixels est plus élevée que sur les écrans simplement “Retina”. Sachant qu’Apple a défini le terme Retina comme étant “la densité suffisante pour que la pixellisation soit imperceptible par l’oeil humain”, le fait qu’ils sortent à présent des écrans plus denses est déjà un aveu que finalement on pouvait faire mieux et que la différence se voit bel et bien à l’oeil nu. Les concurrents l’avaient déjà compris en incorporant dans leurs modèles des écrans plus denses que celui de l’iPhone depuis environ 2 ans.

Mais en réalité, l’écran 5 pouces de l’iPhone 6 affiche 1334×750 pixels et possède la même densité de pixels que les écrans des iPhone 4, 4S, 5 et 5S (soit 320 pixels par pouce); il est simplement plus grand. Seul l’iPhone 6 Plus “mérite” la dénomination Retina HD avec une densité plus élevée de 400 pixels par pouce (1920×1080 pixels).

Même si ces écrans affichent de belles couleurs et un excellent contraste, je trouve personnellement que la finesse d’affichage de l’écran de l’iPhone 6 déçoit face à celle du LG Nexus 5. Ce dernier, sorti l’année dernière au prix de 350€, affiche le même nombre de pixels que l’iPhone 6 Plus (1920×1080) tout en possédant la même taille et le même poids que l’iPhone 6; il présente donc une densité de pixels plus élevée que Retina HD (440 ppi) dans un format bien plus compact qu’une phablette. À taille d’écran égale, les téléphones Android sont d’ailleurs souvent plus compacts que les iPhones car ils ne possèdent généralement pas de bouton physique en façade, remplacé par des boutons virtuels à l’écran.

iPhone 6 vs Nexus 5

À propos du fameux bouton physique en façade de l’iPhone, celui des iPhone 6 intègre également le lecteur d’empreintes digitales Touch ID déjà présent dans l’iPhone 5S, permettant d’identifier son utilisateur.

J’ai également été surpris d’apprendre que les iPhone 6 et 6 Plus n’embarquent que 1 Go de mémoire vive (RAM), soit la même quantité que dans l’iPhone 5 sorti en 2012. La quantité de mémoire vive est généralement liée au nombre de pixels affichés à l’écran et l’iPhone 6 Plus en affiche clairement plus que les précédents modèles. À titre de comparaison, les Samsung Galaxy S4 et LG Nexus 5 (de 2013) possèdent 2 Go de RAM. Vu le prix élevé de l’iPhone 6 Plus, je pense qu’Apple aurait pu faire un effort pour loger au moins 1 Go de RAM supplémentaire dans son téléphone le plus haut de gamme. La marque étant pourtant réputée pour la longévité du support de ses appareils via des mises à jour logicielles, je vois assez mal l’iPhone 6 faire fonctionner correctement les derniers jeux et logiciels sous iOS 10 dans 2 ans.

Plié de rire

Le nouveau design de l’iPhone 6 offre une cure de jouvence bienvenue à la gamme. Les lignes sont inspirées de celles des derniers modèles d’iPad ou encore de l’iPod Touch et le bouton d’alimentation est maintenant placé sur la droite au lieu du haut, afin de pouvoir y accéder plus facilement à une main malgré l’augmentation de la taille des deux appareils. La qualité de construction est exemplaire.

Malgré cela, de grosses rumeurs se sont rapidement répandues sur la toile comme quoi l’iPhone 6 Plus plierait trop facilement dans une poche, causant des dégâts irréversibles. S’en sont suivies des images et vidéos parodiques en tous genres et des blagues comme:

Savez-vous pourquoi l’iPhone 6 se plie ? Parce que l’Apple Store !

Après 2 semaines de railleries, Apple a fini par répondre à ces rumeurs de Bendgate en expliquant que seuls 9 cas d’iPhone pliés avaient été signalés et que l’iPhone 6 Plus ne plie pas plus qu’un autre téléphone. Il faut dire qu’en 2010 la firme avait déjà souffert d’une mauvaise publicité lors du lancement de l’iPhone 4 avec ses vrais problèmes de conception d’antenne qui donnèrent lieu à l’"Antennagate" et la mythique réponse de Steve Jobs à un utilisateur: “Just avoid holding it in that way”.

Depuis cette annonce d’autres cas ont été signalés mais il faut rappeler d’une part que ces téléphones se vendent comme des petits pains et que d’autre part de plus en plus de gens se sont mis à tester volontairement la flexibilité de ces appareils suite à cette nouvelle tendance.

Dans ce cas-ci il n’y a pas de véritable problème de conception même s’il est vrai qu’un appareil très mince présentant une grande surface tout en métal est probablement plus facile à plier qu’un petit téléphone épais en plastique. Un test indépendant réalisé par le laboratoire Consumer Reports démontre que l’iPhone 6 Plus n’est pas le téléphone le plus pliable, même s’il n’est pas aussi résistant que l’iPhone 5S:

Dans tous les cas il n’y a pas de quoi s’inquiéter, les nouveaux iPhones ne sont pas plus fragiles que d’autres téléphones. Mais étant donné leur prix élevé, les heureux propriétaires ont quand même intérêt à en prendre grand soin.

Du NFC uniquement pour payer

L’autre grande nouveauté de ces modèles est l’introduction d’un capteur NFC (communication en champ proche) permettant d’effectuer des payements au moyen du nouveau service Apple Pay, dans le cas où il vous reste de l’argent après l’achat de votre iPhone. Le support de la technologie NFC était déjà présent sur les téléphones Android depuis la version 2.3 (2010) et a été bien amélioré au fil des versions suivantes. Malgré cela, l’utilisation de la technologie NFC pour effectuer des payements avec son smartphone (via Google Wallet par exemple) n’a jamais rencontré le succès. Certains voient Apple Pay comme un nouvel acteur important sur le marché des modes de payement, capable de pousser l’adoption du payement par NFC. Je me permets d’en douter fortement car Apple Pay rentre en concurrence directe avec de grosses sociétés financières comme Paypal qui ont les moyens de rester en place et se renouveler techniquement. D’autant plus qu’Apple Pay n’est disponible que sur les produits Apple.

Par rapport à la concurrence, Apple Pay insiste sur la sécurité et la confidentialité des transactions entre le payeur et sa banque; les tierces parties seront incapables de récolter ne fût-ce que les montants des transactions. C’est peut-être aussi ce qui déplaît à de grosses chaînes de magasin américaines désireuses d’étudier les habitudes d’achat des consommateurs, qui feront tout pour que ceux-ci n’utilisent pas Apple Pay.

On regrettera que la technologie NFC embarquée dans l’iPhone 6 permette uniquement d’effectuer des payements via Apple Pay alors qu’elle offre une multitude de possibilités liées à la lecture et l’écriture de puces embarquées dans des objets et la communication entre appareils, que peuvent déjà exploiter les appareils Android. Peut-être cela sera-t-il possible dans les années à venir via une mise à jour logicielle et la sortie de nouveaux outils pour les développeurs.

Un capteur photo irréprochable ou presque

À chaque nouveau modèle d’iPhone, Apple met en avant les avancées de son nouveau capteur photo, avec raison. L’iPhone 6 est sans conteste l’un des meilleurs photophones du marché, avec une augmentation non négligeable de la qualité des images depuis l’iPhone 5S qui était déjà excellent dans ce domaine et une rapidité de mise au point continue hors du commun. Ce comparatif photo reprenant toutes les versions de l’iPhone vous donnera une bonne idée du chemin parcouru. Vous noterez que l’iPhone 6 retient beaucoup plus de détails en basse lumière que son prédécesseur direct.

L’iPhone 6 est également capable de capturer des vidéos en HD 1080p à 60 images par seconde et au ralenti en 720p à 240 images par seconde (!), soit deux fois plus d’images capturées par seconde que l’iPhone 5S et les autres modèles concurrents. Dans ce mode vous pouvez donc visionner une scène ralentie 8 fois de façon totalement fluide à 30 images par seconde, ce qui est pour le moins impressionnant.

L’iPhone 6 Plus offre en plus une stabilisation d’image optique que l’iPhone 6 ne possède pas, mais dans la pratique la différence de qualité est très peu perceptible.

La seule critique qu’on fera au capteur photo est qu’il ressort de la coque. Des petits malins ont d’ailleurs remarqué qu’Apple avait “gommé” le capteur photo sur les photos de coupe de l’appareil présentes sur son site.

Capteur photo de l'iPhone 6

Comme le capteur photo est le seul élément ressortant du bas de l’appareil, celui-ci ne peut pas être posé de façon parfaitement horizontale sur une surface plane et le capteur est plus facilement exposé aux griffes. D’autres smartphones souffrent du même problème de façon plus ou moins prononcée. Notez que si Apple avait rendu son nouveau smartphone plus épais en ajoutant une plaque métallique de renforcement par exemple, le capteur photo ne dépasserait pas autant et l’iPhone plierait encore moins facilement.

iOS rattrape son retard

Après le matériel, passons maintenant à la partie logicielle. Apple a sorti la mise à jour annuelle de son système d’exploitation pour appareils mobiles. iOS 8 est une mise à jour relativement mineure par rapport à celle de l’an dernier mais néanmoins importante car elle apporte quelques nouveautés bienvenues aux utilisateurs des produits de la firme à la pomme, permettant de combler le retard avec Android sur certains aspects:

  • Support des widgets (Android 1.5, 2009). Les widgets iOS s’affichent dans le centre de notifications, tandis que les widgets Android s’affichent sur l’écran d’accueil
  • Support des claviers tierce partie tels que SwiftKey (Android 1.5, 2009)
  • La possibilité de lancer des actions directement depuis une notification (Android 4.1, 2012)
  • Support de la communication entre applications (Android 1.0, 2008).

Ont également été annoncés de nouveaux services plus récents, liés à l’écosystème de la marque:

  • iCloud Drive pour la gestion de documents en ligne (similaire à Google Drive lancé en 2012)
  • Apple Healthkit, se composant d’une application “tableau de bord” pour surveiller sa santé et d’APIs pour les développeurs, leur permettant de connecter de nouvelles sources de données d’origines diverses à ce tableau de bord. (Google a annoncé une solution quasiment identique pour Android en même temps qu’Apple, baptisée Google Fit)

Toutes ces nouveautés ne sont pas réservées aux nouveaux iPhone mais sont également disponibles pour les autres appareils de la marque éligibles pour la mise à jour vers iOS 8. Dans la pratique, tous les appareils compatibles avec iOS 7 seront mis à jour, à l’exception de l’iPhone 4.

Un lancement dans la douleur

Toutes ces nouveautés sont bien séduisantes en théorie mais dans la pratique le déploiement d’iOS 8 s’est accompagné de problèmes variés.

Pour commencer, de nombreux utilisateurs se sont plaints que leur appareil de génération précédente est plus lent avec iOS 8 qu’avec iOS 7. Désactiver les effets graphiques pourrait améliorer la situation.

Apple a décidé de désactiver HealthKit dans la première version d’iOS 8 sortie le 17 septembre pour des raisons de problèmes détectés à la dernière minute. iCloud Drive était bien disponible, lui, mais par contre l’activer a pour effet de convertir son compte vers le nouveau système, qui n’est pas capable de synchroniser les documents avec des ordinateurs Mac fonctionnant sous Mac OS X Mavericks mais uniquement avec la nouvelle version, Yosemite. Le hic étant que Yosemite n’était pas encore disponible en version finale lorsque iOS 8 a été publié. De quoi faire baisser la productivité de ceux qui dépendaient de la synchronisation de leurs documents avec iCloud sur Mac.

La version 8.0.1 a ensuite été déployée le 24 septembre pour corriger divers bugs et activer HealthKit. Le déploiement de cette version fut rapidement arrêté suite au signalement d’autres bugs plus graves: la perte de réception GSM et des malfonctions de Touch ID sur les nouveaux iPhone 6. En plein scandale bendgate, l’image de la marque à la pomme en a pris un coup.

Le lendemain, la version 8.0.2 corrigeant ces deux bugs critiques a été déployée. Divers bugs ont cependant été rapportés dans cette version également. Parmi les plus critiques, on notera le téléphone qui reste bloqué en mode paysage, le bluetooth qui fonctionne très mal en voiture ou encore une vitesse de téléchargement catastrophique en WiFi dans certaines conditions.

La version 8.1 a été déployée le 20 octobre et semble avoir résolu les problèmes majeurs d’iOS 8.0.2. Quoi qu’il en soit, un bon “factory reset” est recommandé si des problèmes se manifestent après l’installation de cette mise à jour curative. Par contre une nouvelle version 8.1.1 corrigeant d’autres bugs vient de sortir le 17 novembre.

Cela fait donc 5 versions d’iOS déployées chez les utilisateurs en l’espace de seulement 2 mois, et cela malgré le fait que le système était déjà disponible en version de test pour les développeurs depuis juin, permettant à Apple de mieux préparer le terrain. Je crois qu’on peut parler ici d’un manque de rigueur et de tests.

Développeurs et fragmentation

Les développeurs d’applications pour iPhone ont souffert eux aussi de ce lancement précipité avec des outils de développement pas toujours aussi bien finis que ce dont ils avaient l’habitude précédemment, comme en atteste par exemple cet article qui décrit une série de bugs divers dans les outils iOS 8. Ou encore celui-ci qui décrit les nombreux problèmes liés à la toute nouvelle API permettant de développer des claviers tierce partie.

Mais avec ces deux nouveaux modèles d’iPhone et leur écran si particulier, les développeurs iOS sont maintenant confrontés à un problème qu’ils aimaient bien associer exclusivement à Android: la fragmentation des affichages. En effet, tous les écrans d’iPhone avaient jusqu’ici la même taille en points (une unité de mesure indépendante de la densité), à l’exception de ceux des iPhone 5 et 5S dont la hauteur est un peu plus importante que celle de leurs prédécesseurs (mais la largeur en points reste identique). La sortie de l’iPhone 5 avait quand même provoqué à l’époque de nombreux petits problèmes nécessitant des adaptations dans de nombreuses applications, mais les développeurs pouvaient encore s’en sortir assez facilement en testant les deux tailles disponibles et en ajustant la hauteur au cas-par-cas. Par contre aujourd’hui, les iPhone 6 et 6 Plus ont chacun une nouvelle taille d’écran complètement différente des anciens modèles, ce qui fait donc 4 tailles d’écran différentes à supporter sur iPhone et une différence significative entre la plus petite et la plus grande. La taille de l’iPhone 6 Plus est d’ailleurs assez proche de celle d’un iPad Mini.

Les 4 tailles d'iPhone

Il est donc maintenant définitivement hors de question que les développeurs continuent à concevoir les écrans d’applications à l’ancienne en se basant sur des repères fixes. Ils doivent passer à un modèle de type flexible ou “responsive”, comme les développeurs Android le font déjà depuis le début. Les applications pour iPhone qui se basaient déjà sur ce modèle n’auront pas de souci particulier, mais ce n’est pas le cas de la majorité des applications existantes qui devront passer par une phase de refonte plus ou moins complexe pour pouvoir mettre à profit les écrans des iPhone 6 et 6 Plus. Certes, les applications conçues pour l’ancien système s’affichent sur les nouveaux iPhones avec un mode d’étirement d’image mais le résultat est loin d’être idéal (concrètement: texte et boutons surdimensionnés sur les iPhone 6 Plus). Cette phase de reconception de presque toutes les applications est donc tout simplement cruciale pour pouvoir utiliser les iPhone 6 et 6 Plus dans des conditions normales, et donc en ce sens il y a bel et bien eu une fragmentation.

Pour en savoir plus sur les caractéristiques et le rendu un peu particulier de ces nouveaux écrans et leur impact sur le développement d’applications iOS, je vous invite à lire cet excellent article par les créateurs de l’application PaintCode.

Il faut maintenant que les développeurs et les designers d’applications pour iPhone apprennent à maîtriser ces nouveaux concepts parfois complexes d’écrans à taille variable déjà connus des développeurs Android depuis des années et disposant de solutions efficaces sur cette plate-forme. On ne peut pas nier que les écarts entre iOS et Android se font de plus en plus minces.

Des problèmes d’ergonomie

Terminons ce tour d’horizon en mentionnant quelques problèmes d’ergonomie liés aux nouveautés de ces derniers modèles. Apple est réputé pour la simplicité d’usage de ses produits, mais quand il y a des couacs à ce niveau-là, ils méritent qu’on les critique au même titre que leurs concurrents qu’ils accusent souvent de plagiat.

Le challenge ergonomique de ces nouveaux iPhones plus grands, c’est de pouvoir les utiliser à une main. Pour y parvenir, Apple a entre autres utilisé deux techniques très discutables.

L’année passée, la marque a introduit une nouvelle fonction de navigation sur ses appareils: le “swipe to back”. Concrètement, il s’agit de pouvoir naviguer vers l’écran précédent en “tirant” le bord gauche de l’écran vers la droite. Nul doute que ce nouveau geste tactile a été introduit en prévision des nouveaux iPhones, afin de permettre aux utilisateurs de naviguer en arrière sans avoir à atteindre le bouton “retour” qui est toujours situé en haut à gauche de l’écran et qu’on ne peut pas atteindre en utilisant un iPhone 6 à une main. Sur Android le problème ne se pose pas car il y a un bouton “retour” permanent situé en bas de l’écran donc facile à atteindre.

Le but est donc que ce “swipe to back” soit utilisé dans toutes les applications pour fournir une expérience de navigation cohérente aux utilisateurs. Le problème est que c’est loin d’être le cas: de nombreuses applications tierces n’utilisent pas cette fonction, à commencer par celles de Google par exemple. L’une des raisons est qu’elles utilisaient déjà ce geste afin d’ouvrir un menu principal de navigation qui apparaît à gauche de l’écran (qu’on appelle traditionnellement “menu Facebook” ou “menu coulissant”). Même si la firme à la pomme critique l’usage de ce type de menu, elle ne mentionne pas de véritable alternative et il continue à être très populaire chez les développeurs d’applications. On pourrait aussi envisager de déplacer les menus coulissants à droite, changeant les règles qui ont mis quelques années à s’imposer. Mais même les nouvelles applications Apple n’utilisent pas toujours le “swipe to back”. Prenez par exemple la galerie photo: lorsque vous êtes sur le détail d’une photo, tirer le bord gauche de l’écran aura pour effet d’afficher la photo précédente de l’album mais ne vous ramènera pas à l’écran de niveau supérieur. En définitive, puisque ce geste n’est reconnu qu’à certains endroits et qu’il n’y a aucune indication visuelle distinctive permettant de savoir où on peut l’utiliser, il laisse l’utilisateur frustré et n’a pas de vraie utilité pour l’instant.

Une autre fonction qu’Apple a inventé pour aider à la manipulation à une main de l’iPhone 6 et surtout de l’iPhone 6 Plus est un système permettant de descendre l’image affichée afin de rendre accessible sa partie haute.

Reachability sur iPhone 6

Cette fonction plutôt ingénieuse s’active en “double-effleurant” le bouton unique en façade de l’iPhone. Attention, vous devez toucher deux fois le bouton, mais sans l’enfoncer sinon vous risquez de quitter l’application en cours. C’est là que j’ai réalisé que ce bouton, qui fut autrefois le symbole de la simplicité d’usage du premier iPhone, est en fait devenu très compliqué à utiliser. Le bouton est toujours unique, mais possède déjà 5 fonctions différentes:

  • Au départ la seule fonction du bouton était de reconnaître un appui simple pour retourner à l’écran d’accueil;
  • Lorsque le multitâches a été introduit, un double appui sur le bouton a permis de basculer entre les applications ouvertes;
  • Ensuite un appui long a permis le lancement de la reconnaissance de commandes vocales Siri;
  • L’iPhone 5S a introduit la détection d’empreintes digitales par effleurement prolongé du bouton;
  • Et maintenant l’iPhone 6 permet via un double effleurement de descendre l’image affichée.

Toutes ces fonctions sont importantes et accessibles uniquement avec ce bouton. Avouez qu’on a vu plus simple. À choisir, je préfère les différents boutons virtuels bien définis des téléphones Android à ce bouton physique unique d’iPhone à l’usage assez particulier.

Conclusions

Apple nous a encore prouvé qu’il excellait dans la conception matérielle de téléphones haut de gamme, en particulier pour le capteur photo très réussi de ces modèles. Au niveau de l’intégration logicielle de ses appareils par contre, le bilan est plus mitigé. On n’atteint plus le niveau de qualité et d’innovation auxquels nous avait habitués Steve Jobs. C’est bien sûr loin d’être catastrophique et probablement comparable à certaines autres marques, mais au vu du prix de base de ces nouveaux engins qui est de 700 € pour l’iPhone 6 et 800 € pour l’iPhone 6 Plus, on est en droit d’en attendre bien plus que ce que la concurrence vend à la moitié du prix.

Si c’est l’écosystème Apple qui vous convient et que vous êtes prêt à payer ce prix, nul doute que ces modèles sont une mise à jour significative par rapport à leurs prédécesseurs. Si vous hésitez entre les deux modèles, sachez que l’iPhone 6 Plus dispose, en plus de son grand écran, d’une autonomie environ 30% plus importante que celle de l’iPhone 6 grâce à une batterie de plus grande taille.

Si par contre vous être plus neutre et que le rapport qualité/prix est plus important pour vous, vous vous détournerez vite de ces nouveaux iPhones au profit de téléphones Android voir Windows Phone. Tous ne sont pas bons mais il y en a pour tous les goûts et toutes les bourses.

iOS 8 est une mise à jour logicielle qui permet avant tout à cette plate-forme de combler son retard par rapport à Android, et je trouve cela très positif de constater que les 2 OS copient les bonnes idées de l’autre car cela accélère l’innovation mobile dans son ensemble. Les développeurs iOS sont amenés à résoudre des problèmes similaires à ceux des développeurs Android (tailles d’écrans, NFC, communication entre applications, …) ce qui leur donnera plus de visibilité et permettra probablement une meilleure compréhension des deux systèmes. Donc même si vous n’achetez pas d’iPhone 6, vous pouvez vous réjouir de sa sortie.

Christophe Beyls